Monday, January 02, 2006

Ce soir 2

Ce soir, gorges pleines, oreilles internes
Ce soir, chaos et dépravation
Ce soir, restes de vertiges au fond des yeux
Ce soir, l’air bâillonne la solitude
Il y a
Un rêve coincé entre le front et le futur
Celui qui ne pourra jamais sortir de ma tête
Le jus de la douleur
Sous le volume de la musique
Il y a
Dans le cœur de la ruelle
Des boîtes de bières à moitié vides
Et qui traînent derrière elles
Des sermons bavards
Et des envies de néons bleus
Sous le bitume, les mauvaises habitudes
Le corps à corps teigneux des rats de synthèse
Moi, je relève celui qui récidive
L’apprentissage de la flemme
La flemme
Dans un club
Un contrebassiste un peu philosophe
Rêve de crever les yeux
Au manager de dieu
Chance, second coming
Flash back et paranoia :
Au 3ème troisième hôtel du troisième étage
Des ombres chinoises et le théâtre érotique
Tout ce que saxo veut…
Les mains noires feront le reste
Au petit matin,
Le lit est défait
Les paupières sont décharnées
Il y a
Des cadavres de fourmis entre les bouteilles vides
Mais ses yeux sont grands ouverts
Il fixe sur le mur
Un tableau d’Edward Hopper
Tandis que le soleil
Passe dessous la porte
La porte

Ce soir

Ce soir, c’est le petit soir
Passé à épuiser le sens
De tous les mots de la violence
Ce soir comme un écrin dans le rein
Oublié avant demain matin
Un souffle titanesque et inutile
Pour enlever la poussière du vinyl
Et nous voilà réfractaire
Et heureux d’être fier
Encore un soir free jazz de la sève
Encore un soir à mixer du rêve
Addition de saxophone et piano
Soustraction de larve sous la peau…
Rumeur d’écume et greffe d’étoiles sur les ondes
Pour celui qui sèche les lunes et les blondes
Odeur de plume brûlée
Et de sel à moitié volé
Je rampe, sur mes paupières d’or
Et je cherche le sens caché de l’effort
Passif poétique épuisé
Avec tous les déserts pratiqués
Là-bas, je me réveille en ultra moderne
Le casque sur la tête
Et le poids des cernes premières

Larsen

Larsen d’amour
Swing méchant
Le dernier clin d’œil
Sert à tue tête
Nos langues poussièreuses
Contrebasse à l’odeur
Chien policier
Belle qui se dégrafe
Dans le silence
Parfumé à la rose
Cut up solitaire
Dans la cave la plus rouge
Morceau de bravoure
Craché sur la nuque
Charlie Mingus en poster
Des racines et des cernes
Dans un coffret noir
J’ai New York en puzzle
Deux filles sexy
Sur le gros piano
Et des clients bâtard
Le front sur le comptoir
Halogène orphelin
Dans la fumée amère
Tabac d’avant garde
Sur la poudre des coulisses
Cut up sur fous rires :
Clavier tempéré
Et grammaire anglaise
Gorge faible
La salive du non sens
Albert Ayler qui lèche un revolver
Et moi,
Vers ou je plonge
Mord la rage
Free jazz
Revers de la veste
Free jazz
La cave est pleine
Free jazz
L’âme dans le caniveau
Et des notes de teinturier

Nuit fluide

Nuit fluide,
J’aime les étoiles toujours longues
Bullant sur carnaval street
Je détecte les taxis derrière les arbres
Planqués, les velours les plus cool
Plus loin, un marchand de frites
Un colporteur d’idées noires
Font et défont les gens devant les night clubs
Trottoir encombrés, sentiments périphériques
Break de lumière bleue
Sous le trottoir, nos racines noires
Le blue bayou pur
Afro-américain dans les refrains
Les mains jointes pour coller au ride
Et la peau des guitares
Et les lèvres coupées des guimbardes
Ça ressemble à un miroir
Au déchet que fait le rêve après la fièvre
Et la paume de mes mains
Pour faire la copie carbone de notre joie
Dans le couloir de l’hôtel
mordre avec la nuit
Comme l’épaule de cette garce
Qui n’a rien compris de nos racines
Non, c’est le désespoir
Qui sort de ma sarcabane
La soufflette du mal dans la nuque du nouveau-né
Ce soir, j’ai réglé mes aigus
Sur les vu-mètres du blues

Savonette blues

Glisse entre mes mains , blues
Glisse entre mes doigts de pieds, blues
Glisse entre mes jambes, blues
Glisse entre la lune et le soleil, blues
Glisse entre toi et moi, blues
Et savonne mon amour en noir
Glisse entre mes dents, blues
Glisse entre les disques, blues
Glisse entre les notes, blues
Glisse entre les racines, blues
Glisse entre mes narines, blues
Glisse entre tes seins, blues
Et lave ta folie la première
Glisse dans l’eau du bain, blues
Glisse dans mon âme, blues
Glisse, glisse entre mes rêves, blues
Glisse entre mes mots, blues
Glisse entre les portes, blues
Glisse entre nos regards, blues
Et fond comme la vie perfide…

Sur l’échafaud de l’aube

Sur l’échafaud de l’aube
Pleins de doigts coupés
De diamants débordés, de collier fous
Et des rêves de pluies fines

Dehors, après le soupirail
C’est la fin du club
Un cœur léger plis tous les saxophones
Et les rires des sorciers ricochent sur les murs…

Sel, sel rugueux
Sous la bouche
La caricature de nos joies dans l’angle de la fenêtre

Un arbre de mélancolie
Devant lequel on prend racine
Et des chats de gouttière
Qui sortent de ma philosophie

Je l’ai vu pleurer là bas
Pendant un air de Bud Powel
Et c’est la nuit qui lèche ses blessures

Harmonica,
Harmonica de mort
Perle coutume sur l’écho du périphérique,
Voitures insouciantes
Pour gratter la peau du monde
Avec mon singe le plus tendre

Et voilà que l’alchimiste
Passe l’aspirateur dans l’herbe grasse
Tandis que le soleil luit dans les cymbales

La-haut la greffe de nuages s’éternise
Et je pleure des notes interdites

Interdites…

Saturday, June 18, 2005

Conversation de blues

Ce soir,
Conversation de blues entre mes dents
Des récifs tactiles sur les guitares
Et le bois souple des contrebasses

A mon générique
Toutes les filles sexy et tous les hommes au saxo
Je parle, tu parles

Du bleu-nuit de la mitraille

De nos ancêtres
Arrières petits poètes
Qui remontaient le delta

De la sueur de midi
Du coton dans la crasse

Et puis de dieu, sa misère et ses racines

Concentré tout ça dans une note sacrée
Enregistré par microphone vertical

A peine troublé sous le ventilateur
Et le regard de nos mères

Nous sommes musiciens, gratteur de lézard
Avec un boomerang
qui dépasse de la poche

Plus loin,
Nos enfants illégitimes
Nés sur les plis de la rivière
Et qui ricanent comme des petits singes
A la vue de nos chaînes

Un shoot de nuage blond
Pour prolonger le troisième accord
Voilà qu’entre mes ongles, j’entend des voix

Un papillon trop curieux dans ma guitare
Pour celui qui colporte nos histoires
A grandes enjambées

Au-dessus du jazz marécage
A fleur de peau le syndrome

Il faut lever la nuque,
Chassé le poignet trop lourd
Tordre la mouche au passage
Et pointer le nez

Et je me sers du silence
Pour ferrailler
Comme si s’était toujours l’automne
Avec l’eau noire du delta

Ce soir, je ramasse ma fierté
Je rejoue au comptoir
Le blues boogie 1919

Mémoire blues

Mémoire blues
Qui coulisse dans le bras
Les yeux et la bouche humide
Au sortir de la nuit mygale

Je rétrécis dans la musique brève
Toile de douleur

Folie entre mes tempes
Joie évanescente
Accord et spasmes
Overdoses de clair-obscur
Ciel bleu déchiré par les couteaux
Les plis du saxo

Grève des narines
Nimbes cruelles
Haute fidélité des dépressions

Ma tête est par terre
Synchrone avec les chiens
Ville démente, croustillante
Sous les braises infâmes

Jusqu’en haut de mon dos
Une bulle de savon

Mémoire
Mémoire de paupière glacée
Cadavre latin jazz

Je suis dans mon bain tiède
Au 17ème étage du Spirit hôtel

De l’autre côté du mur,
La vermine
Jojo le batteur et son tempo
Pour les filles de joie

Je replonge
Pour être sourd

Sels dans mon eau

Sels dans mon eau
Sucre dans mon âme

Rien n’est jamais pareil en atmosphère

Petit matin :
Revue des zones sur la dixième rue

Deux rangées de trompettes
Alignées sur le trottoir
Attendent les jets d’eau de la voirie

Encore un peu de crasse dans le souffle court
Encore un peu de crème au dessus des nuages
Encore des violons brisés dans les flaques

Encore
Une odeur de ragoût
Et je détecte la solitude

Je ne suis qu’un fantôme un peu prospère
Dont le corps se ressoude
Et épuise la raison
Epuise le non sens

Et mordre dans l’épaule des blondes
Sans rancune

Quel est le goût de la peau quand on a faim ?
Le goût de rien

Central Park à reculons
Je marche dans l’herbe blanche

Maudit phrasé
Dexter Gordon,
Eroll Garner

Des mouchards dans la lumière

Je rampe sur mes notes
Sur le vieux parquet de l’appartement
Par la fenêtre, en négatif
Des pigeons arrogants me font la nique

La vie est cadenassée
La vie sous les néons du club

Je dors et je creuse en même temps
Les sillons de mon disque de chevet

Souffle cool

Souffle cool, corps et âmes perdues
Un soir, le rideau baissé plus court
Plus fou dans la lumière
Plus secret

L’avant garde et le ricochet des filles

Souffle sourd, le modèle ancien
Le style de nos bouches dans la cacophonie
Qui cognent plus dur entre la chair et la nuit

Sonne, sonne
La pluie fine sur le casque doré
Et le creux de métal noir

Sexe et fumée brune
Au sommet de la scène
Une garce couchée sur un piano

Souffle roux, gorge blonde
Relais serré des saxophones

Les cernes au même niveau que l’écriture
Les notes qui copulent au plafond

Solo sur la cendre
Solo dans la foutaise, entre les bières
Solo pour crever au milieu du comptoir

Se déchirer, souffler,
Tomber
et…
baissé le rideau plus court

Friday, May 27, 2005

Once again…



Ventouse de velours
Sur la nuit
Flûte légère, délétère
Qui découpe un nuage de joie

Dans quelle langue je ne sais plus
J’ai parlé de mon rêve intrigant
A gorge déployée
Pendant que des cailloux sublimes
Me rivent à la vision lunaire

Sucre sur la langue
Pour parler mieux
Le “talking that talk”

Alambic sur périphérique
Halogène détourné par des voix sucrées
J’éteins les lumières une à une
Sous mes paupières
La flemme
La flemme est américaine

Je suis fatigué de regardé la liberté
Tendre son bras vers la porte du paradis
Celle qui reste entrouverte

Toute la nuit je baille
Je baille pendant mon blues

Le front à l’envers
Paré pour le non sens
J’affûte mes craies
Pour des graffitis d’amour

J’envisage un ciel de cuir noir
Pour roder mes clins d’œil

Sous mes fenêtres babyloniennes
Je vois
Deux gorilles emporter un piano stenway

Qui a parlé de jungle urbaine ?

J’entend la voix du futur
Dans un petit transistor
Çà et la
Des écrans d’ordinateur
Traversés par des fleurs
-bad trip-

Je suis un flâneur d’avant-garde
Qui regarde sous les bancs la progression des fourmis

Dans une bouche d’égout
Je détecte un air de John Coltrane

Et je ris d’un rire maniaque
Car c’est le dernier club
Avant la fin du monde
Je passe entre les mauvaises ondes
Pour aller chercher le grand sommeil
Et je panique
Comme un vieux pigeon

Sunday, May 01, 2005

Free Jazz Poème en 8 parties

Auteur: Jolyon Derfeuil ©



Part 1


Oublié

Oublié sur l’étagère

Mon vieux solo de blues

Sur la 58ème rue

J’étais presque nu

Je revidais pour la 15ème fois

Ma bouteille de Ginger ale

Et me lavais les dents dans la lune

Oh sexy, sexy

La vendeuse de journaux

Le Times ou

Le New York Herald Tribune

L’horoscope, pourquoi faire ?

J’avais déjà lu dans ma boule

Alors vous pensez, les dollars à la petite cuillère..

Roulement de batterie

Caniveau sous la pluie

Quelques diamants sur la banquette du taxi

Maintenant Free jazz pour l’errance

Un peu de bruit dans les yeux

Des morceaux d’ongle sur le vinyle

J’ai le compteur mauvais

Et l’haleine de même

Mais ce soir j’aime

La radio la radio la radio


Part 2


Broadway Blue jazz,

La lune coincée entre deux tours

Automne-hiver 1956

De boîte en boîte

Je fais des ricochets

Et balance mes cigarettes dans le soupirail

Sur le sidewalk

Les traces d’un saxophone éclaté

Notes éparses,

Overdoses de blue-note

Il est probablement mort

D’avoir trop soufflé

Dans les cernes de ses yeux

Jazz-claque

Deux talons aiguilles dans les prunelles

Je rêve que je souffle dans la lune

Jazzy saxo !

Charlie Parker me tape dans le dos

Et j’expulse…un vibrato

Friction grave

Un peu sourd dans l’âme

Le clavier du cuivre me fend l’oreille

Et laisse la zone en suspend

Mon âme est coincée

Entre les poubelles et les murs

De la 17ème rue

Sexy poubelle, sexy demoiselle

Un air de piano me prend à la gorge

Là-bas, c’est un drôle de tueur

Il dit :

Improvise le couteau

Pendant que j’aiguise un morceau…

Part 3


Musicien du free

Celui qui s’avance en silence

De la paille dans les viscères

Et de l’air dans la tête

Homme faux, labyrinthique

Une note, red note

Qui va et vient dans le corps

Body and soul

Pas trop grave le soir

Dans ses poches des restes de cadavres numériques

Accouplement passé futur

Il rit très fort parce qu’il est sur

L’avenue Oscar Peterson

(l’homme au piano flamboyant)

Il fait nuit et les diamants

Sont dans ses yeux

Il ressort, lessivé d’un de ses clubs

Son maigre cachet sera pour la bouteille

Et le petit déjeuner à l’hôtel


Part 4

Free grave, free jazz, free crime

Contrebasse de bois, duel de note

Cacophonie du cœur

De la nuit

Tout ce qui m’accompagne en killer

Hot dog, homeless dans le creux des yeux

Quelqu’un dans ma tête

Tricote la rumeur du diable

Free jazz, ghost music

Fumigène bleu blues dans l’âme

Est-ce un chien là-bas

Qui se traîne dans la boue ?

Est-ce un caniveau supplémentaire

dans l’escalier de mes arrières pensées ?

Batterie, cymbales de rêve ou…

De la misère du rêve ?

Un jour j’ai rêvé

Du nœud de la nuit

J’ai rêvé

Que je tuais ce maudit saxophoniste

Un lame en travers de la gorge

Pour lui prendre

Le dernier solo de souffle

J’ai rêvé


Part 5


Accords mineurs sous le bitume

La musique de celle

Qui me lèche l’oreille

Au 3ème étage

De la canalisation de gaz

-free gaz-

Je retrouve la fille facile

Qui marche à reculons dans la cuisine

Elle colle

Un domino sur mon front

Et danse

En bullant son chewing-gum

Et je joue

Et je souffle

Et je la maintiens en joue

Elle est sexy dans l’œil du loup

Et moi je serai le loup de cette nuit

Qui se souvient de mon nom

Sax bariton du son

Black parasite de la couleur de mes doigts

Les narines dégagées pour humer

L’odeur de l’air

Entre les buildings

La pointe du rêve américain

Ou le naseau d’un chien mort de faim

Free jazz : baston à tous les étages

Ou le cœur amer de l’Amérique

J’ai rangé mon instrument dans l’étui

Mais les dollars ont moisis

Dans le taxi qui m’emmène

J’entend Taran à la radio

Tout doucement

Je m’endors sur la banquette


Part 6

Il est minuit bientôt

Sur mon bouton blues

New York en point de mire

Et l’alchimie des haleines fraîches

Combien de clones de Travis Bickle

Pendus à mes basques ?

Et combien d’imperméables

A ouvrir dans la boue ?

Je vais de club en club

Avec mon magasin de bouche

Un sax en argent ténor

Qui me tient debout pendant la sueur

Je n’aime que les airs mauvais,

Le souffle cool

Et les bad things du même genre

Les trucs fous que je mets en joue

Yeux dans les yeux

Avec les filles du troisième rang

Les autres,

Les putains les moins frileuses

Restent dehors pour caler les réverbères

Attendant le relevé de proxénètes

L’une d’elle

C’est sur

M’aidera à monter jusqu’au 5ème étage

D’un hôtel crasseux

Et je m’endormirai

Sur son vieux matelas taché

Comme un gros bébé


Part 7


Je rêve de foutaises et de soleil

Et de sax rutilant

Et de cravate en soie

Toujours mieux que les boutons blues

Le petit matin

C’est pour le rappel

Après, je vais me rouler sur le comptoir

Je flinguerai jusqu’à l’aube de la 17ème rue

Pour réviser mes jobs

Et mes liasses de dollars

Orgies sous Brooklyn

Les pas doux des léopards

Qui se cachent sous les voitures

Misère du jazz, foutaises

Tous près, les échos d’une bagarre

Les couteaux cruels

Qui se nettoient dans le sang

Je me lave aussi

Un nuage sur la nuque

Mais qui a parlé de poudre blanche ?

Je me souviens que tous les matins

Charlie Parker, Charlie

Faisait toujours son lit…


Part 8


Il y a du sel sur mon saxo

Et des cris de femmes autour

Des cris dans la chair des voyelles claires

Et dans les notes les plus fécondes

Free jazz hour, mais encore ?

Pas le droit de penser quand on souffle

Souvenir de nausée, cassure

Chose infâme

Je peux lire l’avenir dans la fumée

Et dans le décolleté de la blonde

John Coltrane flotte quelque part

Au dessus de moi

Il ricane

Parce que je suis à l’endroit du piano mort

A quatre heures moins dix

Je range mes oreilles dans l’étui

C’est ma tournée

Dehors,

La sang du tourbillon

Des ivresses harmoniques

Qui me subjuguent

J’ai la fièvre

Et un goût de sel dans la bouche

Les paroles que je range dans ma veste

Sont pour le verre de whisky

The last

Whisky !!

Whisky pour la mouche !!